Origines du Chien de Berger

Les origines du Beauceron remontent à la nuit des temps, et les caractéristiques de ce chien sont le résultat d’une très longue évolution, dont la majeure partie est commune avec les autres races de chiens de berger. Les premières traces de chien domestique datent du Néolithique : il s’agissait du Chien des Tourbières ou Canis familiaris palustris, dont des ossements ont été retrouvés dans certaines stations lacustres du Jura.

Il existe de nombreuses traces de la place du chien aux cotés de l’Homme à partir de l’antiquité : certains figurent sur des tombeaux égyptiens, d’autres furent l’objet de sculptures. Certains apparaissent également dans les œuvres littéraires, qu’il s’agisse de fiction ou de traités « utilitaires ». On peut citer le grec Ovide, dans sa fable Actéon transformé en cerf et dévoré par ses chiens, qui décrit dans la meute un chien : « Pémène qui avait autrefois marché à la suite des troupeaux ». Chez les romains, le chien accompagnant le troupeau figure dans les œuvres de Virgile ou Varron. Columelle décrit trois types de chiens aux côtés de l’Homme : un chien pour la garde de la métairie et des hommes, un chien pour la garde des troupeaux et un chien de chasse : « le chien de berger n’est ni aussi efflanqué ni aussi léger que celui qui est destiné à courir les daims, les cerfs et les animaux les plus légers, mais il n’est non plus ni aussi gros, ni aussi lourd que celui qui est destiné à garder la métairie et les granges. Il est néanmoins robuste, prompt et dispos parce qu’il est destiné autant à attaquer et à se battre qu’à courir, puisque sa destination est de repousser les embûches dressées par les loups, de suivre ces animaux lorsqu’ils s’enfuient avec leur proie et de la leur faire lâcher pour la rapporter ; il est plus mince, plus élancé que le précédent [le chien de garde], tout en ayant les membres aussi forts ; il a la tête plus fine, les oreilles droites et on le prend autant que possible de couleur blanche pour pouvoir le distinguer du loup ». On peut donc en conclure avec certitude que dès l’antiquité le chien accompagnait et servait l’Homme dans le travail au troupeau, son rôle étant à l’époque de protéger les moutons contre les prédateurs éventuels.

On retrouve le chien de troupeau au Moyen-Age. On peut supposer qu’une sorte de sélection existait déjà à l’époque, plus proche de la sélection naturelle, car seuls les individus assez forts pour tenir tête aux prédateurs pouvaient survivre. Gaston Phoebus en fait une description assez proche de celle de Columelle : « non tant gros et pesant que le chien de garde, car on le prend pour guetter et courir, attendu qu’il doit chasser les loups. Doit être blanc afin que le pasteur ne puisse plus facilement les discerner d’entre les loups et le reconnaître à ce moment de la nuit qu’on dit être entre chien et loup. » Les caractéristiques du chien de berger n’ont donc que peu évoluées depuis l’antiquité, de même que sa fonction de protecteur du troupeau « contre les bêtes sauvages et les larcins des hommes ».

Le chien de conduite n’apparaîtra que beaucoup plus tard, les anglais ayant été des précurseurs en la matière. Dès 1750, le docteur John Caius note dans son Treatise of English Dogges : « Le chien de berger est de taille moyenne, utilisé pour rentrer, conduire, rassembler ou isoler les moutons. », et que John Kays, zoologue d’Oxford, décrit à coté du chien de défense un chien de conduite plus petit, qui ramène les brebis errantes au lieu souhaité par le berger, et règle leur allure selon l’ordre reçu.

En France, c’est à la même époque (XVIIIème siècle) que l’on commence seulement à s’intéresser aux races de chiens et à leur fonction. En 1755, Buffon fait dans l’Histoire Naturelle une description des 30 races de chiens rencontrées en Europe, parmi lesquelles il distingue 17 naturelles, les autres étant selon lui issues de croisements entre ces races. Selon lui, la race « chien de berger » serait la plus primitive, celle dont découleraient toutes les autres, car morphologiquement c’est la plus proche des chiens sauvages. 

Il décrit ainsi le chien de berger  : « La taille de ces chiens est en-dessous de celle des mâtins, des grands lévriers et des grands danois ; ils ressemblent beaucoup aux mâtins par la forme de la tête et du museau, qui sont plus gros que dans les lévriers et plus minces que dans les danois. Les chiens de berger ont les oreilles courtes et droites, et la queue dirigée horizontalement en arrière, ou recourbée en haut, et quelquefois pendante. Le poil est long sur tout le corps, à l’exception du museau et de la face extérieure des jambes, et même de la partie postérieure des jambes de derrière qui est au-dessous des talons. Le noir est la couleur dominante de ces chiens ; [l’un deux] a du gris sur la gorge, sur la poitrine et sur le ventre ; les jambes et la queue ont plus de fauve que de noir, il y a aussi deux tâches de couleur fauve au-dessus des yeux, et quelques teintes de cette même couleur sur le museau. On appelle les chiens de cette race Chiens de Berger parce qu’on les emploie à la garde des troupeaux. »

En 1790, c’est au tour du Sieur Liger de le décrire dans sa Nouvelle Maison Rustique : « les Chiens de Berger, pour bien défendre le troupeau (…) sont choisis vifs et hardis (…), de grosse taille, forts, velus, les yeux et les narines noirs, les lèvres d’un rouge obscur (…). On doit les instruire à ramener les brebis égarées et à obéir promptement à la voix du maître ». C’est la première évocation littéraire en France de l’utilisation du chien, non plus seulement dans la garde, mais également dans la conduite du troupeau.

Daubenton, dans la deuxième leçon de son manuel d’Instruction pour les bergers et les propriétaires de troupeaux, intitulée « Sur les chiens de bergers et les loups », y décrit l’importance du rôle de conduite : « il serait à souhaiter que les bergers pussent se passer de chiens, parce que ces animaux font souvent beaucoup de mal aux troupeaux ; mais ils sont nécessaires dans les cantons où l’on rencontre souvent des terres emblavées et exposées au dégât. Quand les moutons s’écartent du troupeau, le berger ne peut retenir que ceux qui sont près de lui, et à la distance où il peut jeter de la terre contre eux. Les chiens aident le berger pour la conduite du troupeau et défendent les moutons contre les loups s’ils sont assez forts. » Il préconise donc de distinguer deux sortes de chiens de troupeau : dans les régions où les loups sont peu à craindre : « on préfèrera la race des chiens qu’on appelle chiens de berger, parce que ce sont ceux que l’on emploie le plus communément pour le service des troupeaux ; ils sont naturellement fort actifs, et on les rend aisément très dociles » ; et dans celles où les loups sont à craindre : « on préfèrera la race des mâtins. Ces chiens sont forts et courageux… ».

On utilise, en terrain accidenté, à cette époque, deux races distinctes : une destinée à la conduite, de petit gabarit, et une plus forte destinée à la protection du troupeau. L’exemple actuel le plus flagrant permettant d’illustrer ces deux  fonctions est celui des chiens de troupeau des Pyrénées, où l’on retrouve l’impressionnant montagne des Pyrénées, destiné à la garde, et le beaucoup plus petit berger des Pyrénées destiné à la conduite qui par son adresse est beaucoup plus à l’aise, en particulier en terrain accidenté.

En plaine, cette distinction est moins marquée et on retrouve plutôt des races de taille intermédiaire leur donnant une certaine force sans les alourdir, et assumant à la fois les rôles de garde et de conduite.

Naissance du Berger de Beauce

 

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